Louise Campbell, musicienne
À quoi ressemblera l’éducation artistique à votre école au cours de l’année scolaire 2020-2021 ? Que ce soit une école primaire, une école secondaire, une université ou un autre établissement, la réponse à cette question changera sans doute plusieurs fois dans les semaines et les mois à venir. Je n’ai pas de réponse à vous offrir, mais je sais que les changements nécessaires dans le contexte de la pandémie ont poussé mes collègues et moi à nous poser des questions, à écouter avec attention les réponses des autres et à réfléchir sur la façon dont nous créons de l’art.
Prenez le projet de balado du Centre C.A.R.E., partenaire de la Commission scolaire English-Montréal, un centre pour adultes ayant des déficiences physiques graves. Plusieurs clients du Centre C.A.R.E. sont non verbaux et utilisent des appareils de communication assistée. Créer des balados avec des personnes non verbales ? À distance et par vidéoconférence ? Le projet initial s’est beaucoup transformé au cours de son déroulement, et il est en train de donner des résultats incroyables.
Le projet de balado Stories of Care devait débuter sur place au Centre C.A.R.E. le 23 mars 2020. Comme nous le savons tous, les fermetures ont commencé le 13 mars 2020. Je venais de rentrer d’un voyage à travers le pays, au cours duquel j’avais pris l’avion, le train et les transports en commun. Certains clients de C.A.R.E. ont des besoins de santé complexes, donc il était clair que ce serait une très mauvaise idée de faire le projet en personne au Centre C.A.R.E. Je n’avais pas du tout envie de transmettre involontairement le coronavirus. Dix jours plus tard, j’ai parlé avec les partenaires du projet, Olivia Quesnel, la directrice générale du Centre C.A.R.E., Isak Goldschneider, d’Innovations en concert, et Tim Brady, de Bradyworks. Nous étions tous d’accord : la baladodiffusion serait le moyen idéal de réaliser le projet à distance.
Hum. D’accord. Maintenant, il faut vraiment faire de cette idée une réalité…
Heureusement pour moi, l’émission de radio C.A.R.E. est l’un des programmes les plus appréciés par les clients du Centre C.A.R.E. Nous avons rapidement transformé l’émission en vidéoconférence Zoom. Le soignant Bruno est devenu un animateur fabuleux, démontrant la même vivacité qu’en personne au Centre C.A.R.E. Je suis devenue un DJ Zoom (et j’essaie toujours de perfectionner les compétences que cela demande !), donnant aux clients, aux soignants et aux proches des clients la possibilité de se parler et de se voir, tout en partageant de la musique à distance. Les séances Zoom sont devenues un lien avec nos clients et un moyen de faire avancer le projet de balado.
La personne qui a donné des ailes au projet, c’est Olivia Quesnel. Elle est capable de cultiver des liens avec les gens en utilisant sa créativité de façon incroyable. Dans le cadre de son travail régulier (en tant que directrice générale du Centre C.A.R.E.), Olivia le fait avec les clients de C.A.R.E. en se servant de plusieurs plates-formes de communication. Elle cherche la meilleure façon de communiquer avec chaque client en fonction de ses capacités et de sa situation familiale.
La nécessité de tisser des liens à distance repousse plus loin encore les limites de cette créativité. C’est toujours la même plate-forme de communication que celle dont je me sers quotidiennement, mais la méthode d’utilisation est parfois assez différente. Par exemple, alors que le Centre C.A.R.E. était fermé, Olivia a organisé des appels téléphoniques quotidiens avec un client non verbal. Elle posait des questions « oui ou non », auxquelles le client répondait en appuyant une fois sur le pavé tactile pour « non » (biiiiiiip) et deux fois pour « oui » (bip- biiiiiiiip !!). Des appels téléphoniques et Zoom enregistrés entre moi-même, Olivia, les soignants, les clients et leurs proches, ainsi que de courtes vidéos pédagogiques sur des activités à faire à la maison et des enregistrements des archives nous ont donné ce dont nous avions besoin pour une série de balados : du matériel audio !
J’ai appris énormément de choses à travers ce projet : la médiation culturelle en ligne, le montage vidéo, l’art du DJ par Zoom et plein de choses autour de la communication assistée, qui a été le sujet de plusieurs épisodes. Le plus important pour moi, et ce que je retiens le plus du projet, c’est le pouvoir du contact humain, ainsi que de notre capacité et de notre volonté de créer des liens avec les personnes qui nous tiennent à cœur.
Je suis très reconnaissante du soutien de l’équipe musicale dans ce projet, qui aurait été impossible sans la contribution d’Isak Goldschneider, de Tim Brady, de Nick Hyatt et d’Amy Horvey, et j’ai un immense respect pour la générosité et l’humanité manifestées par les clients, les soignants et les familles du Centre C.A.R.E. Si nous avons réussi à réaliser un projet comme celui-ci avec un préavis de dix jours, nous devrions être capables de continuer à faire de la musique et à nous impliquer dans la production artistique au cours de l’année. Il faut tout simplement continuer à se parler, à faire preuve de créativité et à s’entraider. Il y aura sans doute des défis en cours de route, mais nous pouvons les relever ensemble.
Comme le dit Bruno à la fin des émissions de radio de C.A.R.E. :
Ne ratez pas le prochain épisode de Stories of Care ! Peace !
Et c’est alors le moment où les clients et leurs proches font des commentaires et bavardent un peu :
C’était tellement amusant ! J’ai adoré vos blagues ! Tu viens demain à la soirée dansante Zoom ? Hé, pouvons-nous faire un appel Zoom plus tard ? Au revoir tout le monde ! À la prochaine !
À écouter : Stories of Care
L’émission Stories of Care a été réalisée par le Centre C.A.R.E., Innovations en concert et Bradyworks, avec l’aide des programmes La culture à l’école et Une école accueille un artiste.